Impact des informations génomiques dans la prise en charge du cancer
« Impact des informations génomiques dans la prise en charge du cancer » par le Docteur Erard de Hemricourt.
Pour ceux qui s’intéressent aux progrès et dernières nouveautés dans le monde de la cancérologie, comme chaque année à la même date, tous les regards se tournent vers les États-Unis où se déroule la réunion annuelle de l’ASCO (American Society of Clinical Oncology).
A cette occasion, le gratin de la communauté mondiale des spécialistes en cancérologie tous sous-domaines confondus (immunothérapie, génétique, cancérologie clinique, hématologues, mais aussi start-ups, compagnies de biotechnologie, groupes pharmaceutiques) s’est donné rendez-vous pour discuter des derniers progrès, dernières études cliniques, derniers essais de recherche fondamentale servant un but unique : stopper le cancer et apporter une survie tant espérée aux millions de patients touchés chaque année par le crabe.
L’une des tendances qui se confirme depuis quelques années est l’importance de plus en plus significative des informations génétiques non seulement de l’individu lui-même mais surtout de la tumeur, qu’elle soit primitive (tumeur originelle) ou secondaire (métastase).
Si l’on croyait, il y a encore quelques années qu’il suffirait de lire à l’intérieur des cellules tumorales pour en comprendre le mécanisme et les détruire avec des thérapies ciblées, la réalité aujourd’hui n’est plus du tout la même. En effet, tout comme les êtres vivants sur terre, les cellules cancéreuses sont soumises à une pression sélective (sorte d’évolution à la sauce darwinienne) qui explique que certaines cellules au sein même d’une tumeur présenteront un patrimoine génétique (avec des mutations de l’ADN) différent des autres cellules tumorales.
Et c’est là toute la complexité. Grâce aux dernières informations en génétique du cancer, on sait maintenant que le comportement d’une cellule métastatique sera complètement différent de celui d’une cellule cancéreuse primitive du fait essentiellement de l’instabilité génétique qui a été le moteur de l’apparition de nouvelles anomalies au sein de l’ADN cellulaire.
Ainsi, les spécialistes misent beaucoup sur l’analyse complexe des biomarqueurs (ensemble des anomalies présentes dans l’ADN tumoral) de toutes les cellules cancéreuses, non seulement des cellules primaires mais aussi des cellules secondaires et même des cellules tumorales en circulation dans le sang.
Et ici, il n’est même pas question de parler des modifications épigénétiques qui, si la situation n’était pas assez difficile à appréhender, interviennent ‘au-dessus’ de l’information génétique pour en moduler son expression.
De nombreux spécialistes (et compagnies pharmacologiques) misent également beaucoup d’espoir (et un paquet de dollars) sur les dernières avancées dans le domaine de l’immunothérapie et de l’immunomodulation. Il en est ainsi pour le mélanome où un nouveau médicament, l’Ipilimumab (Yervoy), a été introduit très récemment dans l’espoir de ‘booster’ le système immunitaire pour mieux faire face au cancer.
D’autres études sorties dernièrement insistent sur le fait de bien connaître son ennemi pour le mettre au sol. Ainsi une étude publiée très récemment dans le JAMA (Using Multiplexed Assays of Oncogenic Drivers in Lung Cancers to Select Targeted Drugs. Mark G. Kris et al. JAMA. 2014;311(19):1998-2006. doi:10.1001/jama.2014.3741) confirme l’importance des biomarqueurs dans l’étude des adénocarcinomes pulmonaires. Dans cette étude publiée, sur plus de 1000 patients testés, 64% présentaient au sein de leur cancer du poumon au moins une mutation génétique repertoriée.
La prochaine étape sera bien entendu de savoir si, le fait d’identifier une certaine anomalie dans l’ADN (ou ARN) tumoral, permet de mieux choisir des thérapies ciblées (cela semble en effet être le cas) et seule l’évaluation au cours du temps permettra de savoir si cette approche thérapeutique est la bonne sur le plan clinique.
L’accumulation de nouvelles données génétiques dans le cancer augmentant à une allure titanesque, on se rend compte que notre vision est assez ‘myope’. Dans un avenir proche, il ne faudra plus parler de mutations ou de biomarqueurs mais d’ensemble de mutations, chacune interagissant avec une autre et créant ainsi un réseau de communications intracellulaires d’une complexité effroyable. Complexité qu’il faudra maîtriser si on espère, un jour, terrasser le dragon.
Docteur Erard de Hemricourt pour News Santé – Tous droits réservés-
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