Ondes électromagnétiques: faut-il s’en protéger?
Téléphones sans fil (et leurs antennes-relais), ordinateurs, fours à micro-ondes, atmosphères WiFi… Les champs électromagnétiques et les radiofréquences ont envahi notre quotidien. Faut-il en avoir peur? Leur danger pour la santé est-il démontré? Et, s’il le faut, comment s’en protéger?
Ces questions sont soulevées à échéances régulières. Et ce d’autant plus que l’approche scientifique pour évaluer ce risque est éminemment complexe. S’il existe, le risque sanitaire est faible et ne peut être expérimentalement mis en évidence qu’au terme d’expositions intenses et/ou prolongées.
Les enjeux industriels et économiques sont considérables, aussi les conflits d’intérêts ne peuvent-ils être ni ignorés ni sous-évalués. Il faut également compter avec les manifestations pathologiques des personnes qui estiment être victimes d’une exposition à ces champs électromagnétiques. Une «hypersensibilité aux ondes» qui ne semble correspondre à aucune cause biologique permettant de les comprendre.
Les conclusions de l’étude
En France, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a rendu public en octobre un avis réactualisé sur cette question. Il concerne au premier chef la téléphonie mobile et les antennes relais, à un moment où les opérateurs rivalisent pour s’approprier les plus grosses parts du marché de la «4G».
Au terme de la relecture et de l’analyse des 300 publications scientifiques internationales faites sur ce thème depuis quatre ans, les experts notent, pour l’essentiel, que l’on observe bien quelques effets biologiques chez les animaux comme chez les humains, mais que ces effets sont fugaces. Ils n’ont pas de traductions physiologiques observables ni –a fortiori– de conséquences pathologiques.
Tumeur cérébrale
De plus, après avoir balayé l’ensemble du système nerveux central (sommeil, fonctions cognitives, maladies dégénératives), l’appareil de reproduction, les systèmes cardiovasculaire et endocrinien, aucun lien véritable de causalité n’a pu être débusqué entre des effets biologiques et d’hypothétiques effets sanitaires. Il faut ici comprendre que si des phénomènes peuvent être observés, ils ne peuvent être attribués aux ondes électromagnétiques.
Seul risque concret évoqué: celui de tumeur cérébrale (gliome, méningiome notamment), et ce uniquement sur la base de consommations intensives et prolongées. L’Anses évoque aussi, avec «le développement massif des technologies recourant aux radiofréquences et conduisant à une exposition intensive de la population» la possibilité d’une augmentation des cas d’«hypersensibilité aux ondes».
Au final, les experts ne voient pas la nécessité, à ce stade des connaissances, de modifier les valeurs limites d’exposition aux champs électromagnétiques.
Particuliers
Pour autant, des mesures s’imposent, selon l’Anses. Des mesures de surveillance du risque. Ainsi, face à l’absence de données ainsi qu’à l’évolution très rapide des modes de consommation des techniques de communication et des expositions de la population en général, l’Anses préconise le lancement de recherches supplémentaires. Et dans l’attente de nouvelles données scientifiques elle recommande aux particuliers:
- de choisir de préférence des téléphones mobiles à faibles «débits d’absorption spécifique»;
- d’utiliser de préférence les kits «mains-libres»;
- de réduire autant que l’on peut l’exposition des enfants;
- de mieux surveiller ses niveaux d’exposition en extérieur et en intérieur;
- de demander à ce que soient affichés les niveaux d’exposition maximaux sur chacun des dispositifs émetteurs de champs électromagnétiques présents dans nos environnements personnels et professionnels.
Pouvoirs publics
L’agence recommande d’autre part aux opérateurs et aux pouvoirs publics:
- de mener des études préalables à la mise en place de nouvelles antennes-relais;
- d’identifier les expositions actuellement les plus élevées et de mener des études de faisabilité technique afin de les réduire;
- de faire afficher les niveaux d’exposition maximaux sur chacun des dispositifs émetteurs de champs électromagnétiques présents dans nos environnements personnels et professionnels.
Addiction et hypersensibilité
Une fois ces recommandations formulées, deux grandes questions demeurent. Et elles réclament que soient au plus vite menées de nouvelles études:
D’abord, comment comprendre (et prendre au mieux en charge) les manifestations actuelles de l’«hypersensibilité aux ondes»? Existe-il un effet nocebo de celles-ci?
En second lieu, nul besoin d’être expert pour observer dans son entourage les symptômes durables et croissants d’une forme d’addiction grandissante aux nouveaux outils de communication. S’agit-il véritablement d’une addiction? Si oui, quels sont les risques? Et comment la prévenir?
Halte à l’abus des ondes?
Au vu des conclusions de l’Anses, le gouvernement français a confié à Jean-François Girard, conseiller d’Etat, et Philippe Tourtelier, ancien député d’Ille-et-Vilaine, une mission sur la «sobriété des ondes électromagnétiques». Ce afin de «répondre aux enjeux d’une nécessaire modération en matière d’émission électromagnétique». Les conclusions de cette mission devraient être connues dans le courant du mois de novembre. Faudra-t-il bientôt apprendre à consommer les ondes avec modération? Avec le slogan «L’abus d’ondes est (peut-être) dangereux pour la santé»?
J.-Y.N.
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