Petits cadeaux des labos aux médecins : influence négative sur les prescriptions (France)
Les cadeaux des laboratoires pharmaceutiques aux médecins généralistes français influencent négativement les prescriptions, montre une étude publiée dans le British Medical Journal.
« L’importance de ces travaux tient au fait, démontré par plusieurs études, que les médecins recevant des avantages, même modestes, sont parfois inconscients de l’influence exercée via ceux-ci par l’industrie pharmaceutique sur leurs prescriptions
», soulignent les chercheurs.
« C’est pour tenir compte de ce constat qu’en mars 2019, un amendement à la loi de santé a été voté pour interdire à cette industrie d’offrir des avantages aux étudiants au sein des facultés de médecine.
»
Bruno Goupil de l’Université de Rennes et Pierre Frouard du CHU de Rennes, ont, avec leurs collègues (1), vérifié s’il existait une association entre d’une part les avantages offerts par l’industrie pharmaceutique aux médecins généralistes français en 2016 (équipement, repas, frais de transport, logement, etc.) et d’autre part le coût de leurs prescriptions médicamenteuses et l’efficience (rapport coûts/bénéfices) de leur prescription.
Ils ont croisé les données de 2016 de la base de données Transparence Santé du ministère de la Santé avec celle de l’Assurance-maladie.
« La base Transparence Santé montre que près de 90 % des médecins généralistes ont déjà reçu au moins un cadeau depuis 2013
», précise Pierre Frouard, coordonnateur de l’étude.
Les 41 257 médecins généralistes libéraux inclus dans l’étude ont été divisés en six groupes en fonction de la valeur monétaire des avantages reçus.
«
De par sa méthodologie, l’étude ne peut pas montrer de lien de cause à effet. Elle permet seulement d’affirmer qu’en moyenne, par rapport aux groupes de médecins ayant reçu des avantages, le groupe de médecins n’ayant reçu aucun avantage en 2016 ni depuis la création de la base Transparence Santé en 2013 est associé à :
des prescriptions moins coûteuses ;
plus de prescriptions de médicaments génériques par rapport aux mêmes médicaments non génériques (antibiotiques, antihypertenseurs, statines) ;
moins de prescriptions de vasodilatateurs et de benzodiazépine pour des durées longues [uniquement comparativement aux groupes de médecins ayant reçu le plus d’avantages] (alprazolam [Xanax…] et bromazépam [Lexomil…] sont des exemples de benzodiazépines, ndlr) ;
moins de prescriptions de sartans comparativement aux inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC), recommandés pour leur efficacité similaire avec un moindre coût [uniquement comparativement aux groupes de médecins ayant reçu le plus d’avantages].
Il n’existe pas de différence significative pour la prescription d’aspirine, de génériques d’antidépresseurs ou de génériques d’inhibiteurs de la pompe à protons. »
Des analyses suggèrent une relation dose-effet entre le montant des avantages reçus et les indicateurs des prescriptions.
« Ces recherches constituent un premier travail d’analyse des données de la base Transparence Santé
», souligne le Dr Bruno Goupil.
« Il semble peu probable que l’argent dépensé par l’industrie pharmaceutique pour la promotion des médicaments le soit à perte. Et en effet, les résultats de notre analyse concordent avec les études existantes qui concluent en faveur d’une influence sur les prescriptions.
»
Pour plus d’informations, voyez les liens plus bas.
(1) Frédéric Balusson, Florian Naudet, Maxime Esvan, Benjamin Bastian et Anthony Chapron.
Psychomédia avec sources : Université de Rennes 1, British Medical Journal.
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