Santé publique : les conséquences du Distilbène® (D.E.S.)

En présence de M. le Sénateur Jean-Pierre Sueur, Vice-Président de la commission des lois,  Anne Levadou, Présidente de l’association de patients Réseau D.E.S. France et le Pr Michel Tournaire, du comité scientifique de l’étude, ont présenté des résultats de la première étude française épidémiologique évaluant toutes les conséquences du Distilbène pour les trois générations concernées : les mères, les filles et fils exposés in utero et les petits-enfants. Menée depuis le mois d’avril 2013, cette étude a bénéficié d’une participation exceptionnelle avec plus de 10 000 questionnaires complétés et 500 000 réponses analysées.

Initiée par l’association Réseau D.E.S. France, cette étude a été financée par l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé (ANSM) dans le cadre de l’appel à projets compétitif lancé auprès des associations de patients en 2012. Elle a été soutenue par la Mutualité Française.

D’après cette étude, le risque de cancer du sein est multiplié par deux pour les 80 000 « filles D.E.S.» exposées in utero en France. Autre enseignement majeur : il existe, pour la troisième génération (issue des « filles D.E.S.»), une augmentation du nombre d’enfants Infirmes Moteurs Cérébraux (IMC) – qui peut être liée à un taux plus élevé de naissances prématurées -, ainsi qu’un risque de malformations plus important.

Cancer du sein : un risque deux fois plus important

Selon l’étude, le risque de cancer du sein est environ doublé pour les « filles D.E.S. », quelle que soit la tranche d’âge (moins de 40 ans, 40-49 ans, 50 ans et plus). En revanche, il n’y aurait pas d’aggravation de ce risque avec l’avancée en âge, contrairement à ce qu’une étude américaine avait pu conclure – cette étude avait en effet trouvé un risque doublé à partir de 40 ans, mais triplé pour la tranche d’âge 50 ans et plus.

Un tel doublement de risque est semblable à celui d’une femme dont une parente au premier degré (mère, sœur, ou fille) a eu un cancer du sein. Cette élévation de risque pose la question d’une adaptation éventuelle du dépistage. A titre d’exemple, les recommandations de l’Institut Gustave Roussy de Villejuif, pour prévenir un cancer du sein chez une apparentée au premier degré sont les suivantes : « ce point doit être signalé à votre gynécologue. En fonction de vos autres facteurs de risque personnels (selon l’âge de vos premières règles, de votre ménopause, de vos grossesses, etc.), une surveillance adaptée sera proposée. »

Ces résultats confortent la recommandation de suivi des « filles D.E.S. », d’une visite annuelle  chez le gynécologue, même en l’absence de tout symptôme, avec :

• un examen gynécologique à la recherche d’anomalies du vagin et de l’utérus,
• des frottis du vagin et du col ; une colposcopie en fonction des résultats du frottis,
• un examen clinique des seins. En fonction de l’ensemble des facteurs de risque de cancer du sein (exposition au D.E.S. mais aussi autres risques personnels et familiaux), une mammographie sera éventuellement proposée.

Des pertes de sang inexpliquées, ou l’apparition d’une anomalie dans un sein, doivent faire rapidement  consulter.

Des risques de handicap et de malformations pour les enfants des « filles D.E.S. »

Une conséquence du D.E.S., probablement la plus importante en raison de sa gravité, est mise en évidence : l’augmentation du nombre d’enfants Infirmes Moteurs Cérébraux (IMC), liée à un taux plusélevé de naissances prématurées, en particulier très prématurées.

Par ailleurs, des malformations pour les enfants des « filles D.E.S. » ont été constatées :

Pour les filles et garçons :  Une augmentation des cas d’atrésies (obstruction) de l’œsophage : 14 cas signalés, aucun cas dans le groupe témoin.  Un doute pour les malformations cardio-vasculaires. Une élévation a été observée, mais elle se situe à la limite du niveau significatif. Cela confirme la nécessité de poursuivre des recherches.

Pour les garçons :  Une forte incidence des cas d’hypospadias. Une fréquence augmentée de cryptorchidie.

Pour les filles : Les anomalies génitales ne sont pas en excès (contrairement à ce qui était redouté).

Compte tenu de ces résultats, des grossesses étant attendues jusqu’en 2020 environ, les recommandations de leur suivi médical, émises en 2011 par l’AFSSAPS, restent d’actualité. Les « filles D.E.S. » bénéficient d’un congé maternité spécifique (loi votée le 24 décembre 2004).

+29 % de cancer du sein chez les « mères D.E.S »

On retrouve, dans les résultats de l’étude, la légère augmentation de la fréquence du cancer du sein (+29 %), connue depuis les études américaines de 1984 et 1993. Il n’y avait pas d’augmentation de risque pour les autres cancers. Par ailleurs, aucune complication non encore décelée n’a été révélée.

M. le Sénateur Jean-Pierre Sueur, Vice-Président de la commission des lois

« Je soutiens depuis l’origine – d’abord comme député, aujourd’hui comme sénateur – l’action très remarquable de l’association Réseau D.E.S. France. Au prix d’un inlassable dévouement et d’une grande  ténacité, ses membres ont réussi à démontrer les effets très nocifs du Distilbène sur les femmes à qui il a été prescrit, sur leurs filles et leurs petits enfants – et à obtenir – encore potentiellement ! – les réparations et les mesures de prévention indispensables. Cette action est appuyée par des scientifiques de haut  niveau. L’association D.E.S. France rend publiques aujourd’hui avec ces scientifiques des données précises et précieuses, dont les pouvoirs publics doivent tenir le plus grand compte.

Jean-Martin Cohen-Solal, Délégué général de la Mutualité Française

« Il était clé pour la Mutualité Française de soutenir cette étude pour évaluer toutes les conséquences du Distilbène et contribuer ainsi à mieux prévenir les risques de cancer, malformation ou handicap liés àcette substance. »

Anne Levadou, Présidente de l’association Réseau D.E.S. France

« L’histoire du D.E.S. n’est pas terminée. Réseau D.E.S. France va continuer de se mobiliser pour que l’information parvienne à tous les professionnels de la santé pour que les « filles D.E.S. » bénéficient d’unsuivi médical adapté. »

Pr Michel Tournaire, conseiller scientifique de Réseau D.E.S. France

Cette enquête est exemplaire car elle illustre deux rôles possibles d’une association de patients. Réseau D.E.S. France a réussi à réaliser une vaste étude scientifique, grâce à une mobilisation exceptionnelle des « familles D.E.S. », de la Mutualité Française et des médias. Elle va maintenant informer directement le public concerné et les médecins, afin qu’ils choisissent ensemble la meilleure prise en charge pour limiter les effets secondaires de cette exposition.

Ceci est un communiqué du Réseau D.E.S. France, une association de patients créée en 1994 qui a pour missions : l’information des personnes concernées pour organiser la prévention; le soutien des personnes concernées; la coopération avec différents organismes, pour améliorer l’information et la prise en charge médicale des personnes subissant les effets du D.E.S.; l’information et la sensibilisation de la société civile en matière de pharmacovigilance.

Rappelons que Distilbène et Stilboestrol Borne sont les noms commerciaux français de l’oestrogène de synthèse diéthylstilboestrol – en abrégé D.E.S. L’inefficacité du D.E.S. pour prévenir les fausses couches a été établie en 1953. En France, entre 1948 et 1977, 200 000 femmes enceintes ont reçu du D.E.S. On estime à 160 000 le nombre de naissances d’enfants concernés.

A propos de la Mutualité Française :  La Mutualité Française, acteur majeur de santé et de protection sociale, relaie l’étude « Santé publique : quelles conséquences du Distilbène ? » au titre de son action en matière de prévention santé.

Présidée par Etienne Caniard, la Mutualité Française fédère la quasi-totalité des mutuelles santé en  France, soit 450 mutuelles. Six Français sur dix sont protégés par une mutuelle de la Mutualité Française, soit près de 38 millions de personnes et quelque 18 millions d’adhérents.

Les mutuelles interviennent comme premier financeur des dépenses de santé après la Sécurité sociale.  Ce sont des sociétés de personnes à but non lucratif : elles ne versent pas de dividendes. Régies par le code la Mutualité, elles ne pratiquent pas la sélection des risques.

Les mutuelles disposent également d’un réel savoir-faire médical et exercent une action de régulation des  dépenses de santé et d’innovation sociale à travers près de 2 500 services de soins et  d’accompagnement mutualistes : établissements hospitaliers, centres de santé médicaux, centres  dentaires et d’optique, établissements pour la petite enfance, services aux personnes âgées et aux personnes en situation de handicap, etc. Pour accompagner leurs adhérents tout au long de leur vie, elles  mettent à leur disposition Priorité Santé Mutualiste, le service d’information, d’aide à l’orientation et de  soutien sur des questions de santé.

La Mutualité Française contribue aussi à la prévention et à la promotion de la santé à travers son réseau d’unions régionales et ses services de soins et d’accompagnement.


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