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Climat : des lundis sans viande pour compenser des vacances en avion  ? Une explication pour un biais psychologique

Tout acte de consommation, d’un produit ou d’un service, génère nécessairement un impact sur l’environnement (une empreinte écologique) car sa production ou sa prestation est liée à l’émission de gaz à effet de serre.

Pourtant les consommateurs pensent parfois que l’empreinte écologique d’un produit portant un label tel que « respectueux de l’environnement » (écologique, vert, durable, « eco-friendly ») est négative.

Ce biais cognitif, l’« illusion de l’empreinte écologique négative », se manifeste dans certaines situations.

Par exemple, les consommateurs peuvent estimer qu’un hamburger et une pomme dite écologique ont une moins grande empreinte écologique totale que le hamburger seul ou encore ou que les émissions totales d’un parc automobile restent les mêmes lorsque des voitures électriques sont ajoutées au parc. Ce biais a été montré dans plusieurs études.

L’illusion contribue notamment à la croyance que des comportements nuisibles pour l’environnement peuvent être compensés par des comportements dits écologiques. Ce qui peut amener, par exemple, à se déculpabiliser de prendre des vacances en avion en adoptant les lundis sans viande ou en diminuant la durée des douches.

« En réalité, toute consommation cause des dommages permanents à l’environnement, et les options vertes sont au mieux moins nocives plutôt que restauratives », soulignent les psychologues Patrik Sörqvist et Linda Langeborg de l’Université de Gävle (Suède) dans le numéro de mars de la revue Frontiers in Psychology.

Ils soutiennent que l’une des raisons de ce biais pourrait être que les gens appliquent aux questions d’impact environnemental des jugements innés et intuitifs (heuristiques, raccourcis mentaux) qui se sont à l’origine développés pour gérer les échanges sociaux.

Dans le domaine des interactions sociales, les décisions moralement justes et injustes peuvent s’annuler mutuellement. « La réciprocité et l’équilibre dans les relations sociales ont été fondamentaux pour la coopération sociale, et donc pour la survie, de sorte que le cerveau humain s’est spécialisé par la sélection naturelle dans le calcul et la recherche de cet équilibre », explique Patrik Sörqvist.

Mais lorsque cette pensée sociale de concessions mutuelles est appliquée au changement climatique, elle conduit à l’idée fausse que les choix « verts » peuvent compenser les choix non durables.

« Tu ne peux pas embrasser l’environnement et te réconcilier » blague-t-il. « Voler vers les pays chauds fait de vous un énorme fardeau environnemental, quel que soit le nombre de lundis sans viande que vous adoptez ».

Lorsque le raisonnement social est appliqué aux comportements liés à l’environnement, les gens ont tendance à penser en termes d’équilibre entre les comportements « respectueux de l’environnement » et les comportements « nocifs », et à prendre en compte moralement leur moyenne plutôt que leur somme.

« La “culpabilité écologique” due au déséquilibre du compte environnemental moral peut favoriser des actes pro-environnementaux, mais aussi des actes qui semblent pro-environnementaux, mais qui sont en réalité plus nuisibles que de ne rien faire du tout. »

« Des mots tels que “respectueux de l’environnement”, “eco-friendly” et “écologique” risquent de faire croire au public que les objets, comportements et décisions portant ces labels sont “bons” plutôt que “moins mauvais” pour l’environnement », souligne Linda Langeborg.

« Nous devrions donner aux consommateurs une rétroaction immédiate sur la mesure dans laquelle les produits portant un label écologique et les autres produits qu’ils achètent contribuent à l’impact environnemental. Par exemple, les systèmes de scanner des supermarchés pourraient fournir aux clients une estimation de l’empreinte carbone accumulée de leur panier d’achats », suggère Langeborg.

Pour plus d’informations, voyez les liens plus bas.

Psychomédia avec sources : Frontiers in Psychology, Frontiers.
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Une explication pour la tendance aux jugements moraux « noir ou blanc »

Tueriez-vous une personne innocente pour en sauver cinq ? Votre popularité pourrait dépendre de votre réponse. Les gens évaluent si les autres sont dignes de confiance sur la base de leurs jugements moraux, montre une étude publiée dans le Journal of Experimental Psychology : General (JEPG).

Les gens ont tendance à préférer, comme partenaires sociaux, ceux qui basent leurs décisions morales sur des principes absolus plutôt que sur une analyse des conséquences, montre l’étude.

Ces résultats, estiment les chercheurs, peuvent aider à expliquer pourquoi les jugements instantanés sur la moralité ont tendance à être basés sur un ensemble de règles morales absolues (telles que « ne pas tuer des innocents »), même si l’on peut prendre des décisions différentes lorsqu’on a plus de temps.

Le chercheur en psychologie Jim A.C. Everett et ses collègues (1) des universités Oxford et Cornell ont comparé deux écoles de pensée sur la morale.

Les approches conséquentialistes considèrent que nous devrions viser à maximiser le plus grand bien pour le plus grand nombre, même si cela implique de causer un préjudice, comme de tuer une personne pour en sauver cinq.

À l’opposé, les approches déontologiques mettent l’accent sur les règles morales et les idées de droits et de devoirs, de sorte que certaines choses (comme tuer une personne innocente) sont mauvaises, même si elles maximisent de bons résultats (comme sauver des vies supplémentaires).

Les gens ont tendance à adopter le style déontologique de moralité, « ce qui suggère que ces règles morales ont, en quelque sorte, été codées dans la nature humaine », expliquent Everett et ses collègues (1). « Mais pourquoi ? »

« Les psychologues ont fait valoir que les intuitions déontologiques résultent de réactions émotionnelles “irrationnelles”, mais nos travaux suggèrent une autre explication : la popularité. Si les gens qui adhèrent à des absolus moraux sont préférés en tant que partenaires sociaux, exprimer ce point de vue permet de retirer des avantages pour soi-même. Avec le temps, cela pourrait favoriser un type de pensée morale par rapport à un autre au niveau de la population globale. Et cela a un sens : on frémit à la pensée d’un ami ou d’un partenaire faisant une analyse coût/bénéfice pour savoir si vous devriez être sacrifié pour le plus grand bien. Plutôt que de refléter une pensée émotionnelle erronée, le jugement moral basé sur des règles pourrait être une caractéristique adaptative de nos esprits. »

Pour tester cette idée, les chercheurs ont utilisé plusieurs variantes de dilemmes moraux où la personne doit décider de sacrifier ou non une personne innocente pour sauver la vie de plusieurs d’autres. Les participants devaient ensuite indiquer s’ils préféraient, comme partenaires sociaux, ceux qui avaient fait des jugements basés sur les règles ou ceux qui se basaient sur une analyse des conséquences.

À travers 5 expériences, avec plus de 2400 participants, ils ont constaté que les gens qui avaient une approche absolue (refusant de tuer une personne innocente, même lorsque cela maximiserait le plus grand bien) étaient considérés comme plus fiables.

Lorsqu’on leur demandait de faire confiance à une autre personne dans un contexte impliquant une somme d’argent, les participants remettaient plus d’argent, et étaient plus confiants de le récupérer, avec quelqu’un qui avait refusé de sacrifier quelqu’un pour en sauver plusieurs.

Mais, simplement décider de sacrifier ou non un innocent n’était pas la seule chose qui importait. Quelqu’un qui avait décidé de sacrifier une vie pour en sauver cinq mais avait trouvé cette décision difficile semblait plus digne de confiance que quelqu’un qui avait trouvé la décision facile.

Et ceux qui avaient refusé de tuer n’étaient pas toujours jugés plus dignes de confiance. Lorsque la personne qui pouvait être sacrifiée indiquait un désir spécifique de vivre ou une volonté de mourir, les gens favorisaient les individus qui avaient respecté les souhaits, même si le meurtre était impliqué.

« Cela contribue à expliquer pourquoi nous semblons aimer les gens qui adhèrent à ces règles morales intuitives – non pas parce qu’ils collent à la lettre de la loi, mais parce que les règles elles-mêmes ont tendance à insister sur l’importance absolue de respecter les souhaits et les désirs des autres ».

Ces résultats, concluent les chercheurs, montrent que les décisions morales de la vie de tous les jours ne correspondent pas exactement aux catégories nettement définies par les philosophes de la moralité. La moralité de tous les jours est plutôt adaptée à la complexité des situations de la vie réelle.

(1) Molly J. Crockett et David Pizarro.

Psychomédia avec sources : University of Oxford, JEPG.
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