Archives par mot-clé : Guyane

Des cas de chikungunya en Guyane et Guadeloupe

Share Button

Le Chikungunya sévit depuis quelques semaines dans les départements français d’Amérique. Une épidémie de chikungunya a été signalé dans la partie française de l’île de Saint-Martin, dans les Caraïbes, et deux cas autochtones de cette maladie ont été confirmés en Martinique. La Guyane et la Guadeloupe sont également touchées.

Épidémie à Saint-Martin

Les services de l’Agence Régionale de Santé à St-Martin ont recensé sur l’ile plusieurs cas de Chikungunya. L’Agence de Santé, via le pôle Veille sanitaire et l’Institut National de Veille Sanitaire (CIRE Antilles Guyane) ont immédiatement déployé un dispositif de surveillance renforcé.

Le 6 décembre 2013, la confirmation de ces cas autochtones par le laboratoire français de référence pour ce type de virus situé à Marseille a généré une alerte. L’île, divisée en une partie française et une partie néérlandaise, est frappée par une épidémie de dengue depuis janvier dernier. Des investigations et une surveillance renforcée avait été mises en place dès le signalement de cas suspects de Chikungunya dans le quartier d’Oyster Pond le 16 novembre 2013.

Les investigations mises en place ont permis d’identifier 34 cas cliniquement suspects survenus entre le 5 octobre et le 4 décembre 2013. Ces cas sont situés majoritairement dans le quartier d’Oyster Pond mais plusieurs cas sont signalés dans d’autres quartiers (Sandy Ground, Saint James, Marigot, Agrement, Quartier d’Orléans…).

En termes de diagnostic biologique effectué par le CNR des Arbovirus à Marseille, 10 de ces 34 cas ont été confirmés biologiquement, 4 autres cas sont des infections probables à chikungunya (sérologies IgM et IgG positives).

Tous les cas déjà interrogés sont des cas autochtones (pas de voyage en zone à risque dans les 2 semaines avant l’apparition des signes). L’âge moyen des cas est de 45 ans. Deux enfants de moins de 15 ans figurent parmi les cas.

Le dispositif de surveillance épidémiologique repose désormais à Saint-Martin sur l’adhésion de tous les médecins cliniciens, de ville ou hospitaliers, et sur les données du laboratoires d’analyses biologiques. Il est impératif de protéger immédiatement des piqûres d’Aedes un patient suspect fébrile (celui-ci pouvant être virémique), avant même le retour des résultats des examens sanguins. Cette protection (moustiquaire, répulsifs…) doit être poursuivie au minimum pendant 7 jours après le début des symptômes.Dengue

Deux cas de Chikungunya en Martinique

L’Agence Régionale de Santé (ARS) a annoncé que deux cas de chikungunya ont été confirmés jeudi dernier en Martinique par le Centre National de Référence de Marseille.

Les agences régionales de santé (ARS) de Guadeloupe – également compétente pour Saint-Martin – et de Martinique ont mis en œuvre toutes les mesures de surveillance épidémiologique (cas humains), entomologique (surveillance des moustiques, vecteurs de la maladie) et de prévention. Ces mesures constituent des moyens efficaces pour réduire les risques d’infection par les maladies transmises par les moustiques comme la dengue et le chikungunya.

Les femmes enceintes et les parents d’enfants et de nourrissons doivent adopter des mesures de protection spécifiques : outre les vêtements couvrants, utiliser des produits répulsifs adaptés à l’âge en respectant les précautions d’emploi et protéger les berceaux et poussettes par des moustiquaires (l’utilisation des répulsifs avant deux mois est déconseillée).

Dans l’habitat, on peut utiliser des insecticides en bombe ou des répulsifs domestiques comme les diffuseurs électriques et à l’extérieur, des tortillons fumigènes. Les moustiques craignant les endroits frais, la climatisation diminue le risque de piqûre.

Surveillance renforcée en Guyane

Un premier cas de chikungunya a été identifié par l‘Agence régionale de santé du département (ARS) en Guyane. Malgré une surveillance renforcée de la part des autorités sanitaires, ce département d’outre-mer français d’Amérique du Sud n’a pas échappé à l’épidémie de chikungunya qui touche la région Caraïbe. Le cas confirmé en Guyane a été « importé » de Saint Martin. L’Agence régionale de Santé, le Conseil Général et la CIRE Antilles Guyane ont d’ores et déjà déployé un dispositif de surveillance renforcé.

Conformément au protocole de l’Organisation mondiale de la Santé, le ministère des affaires sociales et de la santé rappelle les mesures individuelles de prévention et de protection contre les piqûres de moustiques : porter des vêtements longs et couvrants et protéger pieds et chevilles; dormir la nuit sous une moustiquaire imprégnée d’insecticides; imprégner les vêtements d’insecticides, pour une protection à long terme; et appliquer ou vaporiser des produits répulsifs adaptés sur toutes les parties découvertes du corps, visage compris (l’application doit être renouvelée fréquemment et au moins 30 minutes après les produits solaires).

Un cas de chikungunya en Guadeloupe

Un enfant est touché par le chikungunya en Guadeloupe. Il a été pris en charge par son médecin traitant et ne présente plus aucun signe clinique. Les mesures de contrôle ont été mises en œuvre immédiatement après le signalement de ce cas.

Le service de démoustication est notamment chargé d’informer les personnes exposées sur les mesures de protection individuelle contre les piqûres de moustiques, de destruction des moustiques adultes présents au domicile et de suppression des gîtes potentiels dans leur environnement.

A propos du Chikungunya

Le Chikungunya est une arbovirose, résultant d’une infection par le virus chikungunya, appartenant à la famille des alphavirus et dont la transmission se fait d’homme à homme par l’intermédiaire de moustiques du genre Aedes.

Après une incubation silencieuse de 4 à 7 jours en moyenne (mais pouvant être comprise entre 1 et 12 jours), une fièvre élevée apparaît brutalement accompagnée d’arthralgies pouvant être intenses, touchant principalement les extrémités (poignets, chevilles et phalanges). D’autres signes peuvent également survenir : des myalgies, des céphalées et un exanthème maculo-papuleux qui peut s’accompagner d’un prurit cutané, notamment au niveau de la voûte plantaire. Des hémorragies bénignes à type de gingivorragies et d’épistaxis sont aussi possibles, surtout chez les enfants.

La phase aiguë de l’infection par le Chikungunya dure en moyenne 5 à 10 jours. Elle correspond à la phase virémique, phase pendant laquelle le malade peut être piqué par un autre moustique et entretenir la chaîne de transmission. Les infections asymptomatiques sont possibles.

Les symptômes aigus régressent généralement en 5 à 10 jours. Néanmoins, après une phase asymptomatique, des rechutes articulaires avec ou sans fièvre peuvent survenir par intermittence. La maladie peut évoluer vers une phase chronique marquée par des arthralgies persistantes provoquant une incapacité partielle pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois (parfois années). Dans tous les cas, l’immunité acquise paraît durable.

Fièvre et arthralgies sont des manifestations communes à d’autres pathologies que le chikungunya tels que la dengue, le paludisme, la leptospirose, le rhumatisme articulaire aigu et d’autres infections à alphavirus. La dengue endémo-épidémique aux Antilles-Guyane, fait partie de ces pathologies. Il est donc primordial d’effectuer le diagnostic différentiel entre ces pathologies face à un malade présentant ces signes. En cas de suspicion clinique, le diagnostic peut être confirmé par des analyses biologiques (dans les 5 jours suivant le début des signes par amplification génique ou RT-PCR, par sérodiagnostic ensuite).

La période de virémie (durant laquelle le virus peut être transmis à un moustique Ae. aegypti lors d’une piqûre) est estimée, en moyenne, à 5 jours après le début des signes mais peut s’étendre jusqu’à 12 jours dans certains cas. Lorsqu’un moustique s’infecte en piquant une personne en phase de virémie, il y a multiplication du virus dans le moustique. Ce cycle, appelé extrinsèque, dure environ 5 à 7 jours. Le moustique devient alors capable de contaminer d’autres personnes lors de la prise de son repas sanguin, et cela jusqu’à la fin de sa vie dont la durée est estimée entre 1 et 2 mois.

Ces autres personnes pourront déclarer la maladie après 4 à 7 jours d’incubation. Les cas de contamination secondaire peuvent alors apparaître avec un délai d’au plus tôt 9 jours après la date de début de la maladie chez le cas primaire ou la date d’arrivée d’un cas virémique dans le territoire si le cas est importé.

Google+

Commentaires


Top Actus Santé

La Réunion, Guadeloupe, Guyane: la bataille du sucre

DOM 1-Sucre 0. Peu de gens le savent en France métropolitaine, mais les départements d’outre-mer mènent contre l’obésité et le diabète une guerre longue et difficile. Et inégale. La faute à des teneurs en sucre explosives dans les aliments qui sont vendus dans les départements d’Outremer. Claudine Robert-Hoarau[1], diététicienne-nutritionniste à Saint-Denis de La Réunion donne quelques exemples:

«Selon une étude effectuée par l’ARS et la DAAF[2], les “tonics et bitters” auraient une teneur en sucre à la Réunion de plus 28% que celle contenue dans les produits fabriqués en Métropole et les yaourts aux fruits de +12%.»

Des écarts qui pouvaient osciller entre 34,66% et 48,59% sur un produit tel que le Fanta orange[3].

L’adoption, en mai dernier, d’une loi visant à aligner le taux de sucre des aliments sur celui de la Métropole s’avère donc une étape décisive dans ce combat. Toutefois, pour que la victoire soit complète, il faut parvenir à modifier des pratiques et des habitudes ancrées depuis des décennies.

Pourquoi les produits sont-ils plus sucrés?

Comme nous le rappelle la députée guadeloupéenne Hélène Vainqueur-Christophe[4]«il n’existait aucune loi, ni en France métropolitaine, ni dans les départements d’outre-mer, réglementant le taux de sucre dans les aliments ou encore les dates de péremption. Il y avait simplement des pratiques […] Ce texte obligera les industriels à baisser le taux de sucre de tous les produits». Dans la mesure où les usages des industriels sont fréquemment différents dans les départements d’outre-mer, les produits de consommation courante avaient une concentration en sucre supérieure à celle des mêmes produits de mêmes marques vendus en France hexagonale.

Pour expliquer l’importance de ces écarts, tout le monde y va de son interprétation: «C’est peut-être dû au fait que nous sommes producteur de sucre. Nous avons donc une relation au sucre différente que les pays qui n’en produisent pas», suppose la diététicienne-nutritionniste guyanaise Armide Lafortune. Pour Claudine Robert-Hoarau, «deux raisons expliquent cette différence. La première est liée à des contraintes industrielles: La Réunion ne produisant pas assez de lait, le recours au lait reconstitué à base de lait en poudre est nécessaire. De ce fait, la teneur en lactose est plus importante et par là même la teneur en glucides sur le produit fini. La deuxième se situerait au niveau gustatif, des tests d’acceptabilité ayant été effectués sur des consommateurs».

Et la députée guadeloupéenne Hélène Vainqueur-Christophe de rappeler l’argument que les industriels aiment à lui répéter:

«Bien que départements français, les Antilles-Guyane sont dans la zone Amérique et celle-ci répond à des normes particulières.»

Comment expliquer dans ce cas que Mayotte et La Réunion aient pu constater des écarts équivalents?

Le surpoids, l’obésité et le diabète atteignent des niveaux record dans les DOM comparativement à la situation de l’Hexagone. Selon une enquête menée par l’ARS sur des enfants de CM2 pour l’année scolaire 2011-2012,  26,2% d’entre eux sont en surpoids contre 19,7% en France métropolitaine et 8,7% en situation d’obésité contre 3,7% en Métropole.

D’autre part, un adulte sur deux serait en surpoids ou obèse à la Réunion. Aux Antilles-Guyane, la situation est quasiment équivalente. En 2009, on recensait 9,3% d’obèses chez les 5-14 ans en Martinique, 8,9% en Guadeloupe et 6,4% en Guyane. Quant aux taux de prévalence du diabète, ils sont également plus élevés dans les DOM avec notamment 8,8% à La Réunion en 2009 contre 4% pour la moyenne française[5].

Toutefois, Claudine Robert-Hoarau réfute l’idée que le sucre puisse être à lui seul responsable de ce fléau:

«Ce n’est pas un produit particulier qui est à l’origine du diabète et de l’obésité mais l’alimentation globale associée à d’autres facteurs. L’obésité est une maladie multifactorielle. Il s’agit d’une interaction entre le facteur génétique et les facteurs environnementaux, c’est-à-dire une alimentation trop riche et un manque d’activité physique.»

Alors, plus de cari ou d’accras?

Bien sûr, il n’est nullement question de dire adieu à un bon cari, aux accras, aux samossas, ni même aux nombreux plats en sauce ou encore aux sorbets coco, aux tourments d’amour et au ti punch… Non, le défi consiste à conserver ces traditions mais avec le souci de l’équilibre et de la modération. Selon Armide Lafortune, «il s’agit de réconcilier les pratiques culturelles et les besoins vitaux en sucre».

S’il est vrai que la loi va dans le bon sens en englobant tous les produits fabriqués par l’industrie agro-alimentaire y compris les préparations locales, les diététiciens restent mesurés quant à son impact sur la santé publique: «Je ne pense pas qu’elle aura un impact direct sur la réduction de l’obésité, mais elle permet une sensibilisation au problème», explique Armide Lafortune. Pour sa part, Claudine Robert-Hoarau affirme:

«Cette loi ne change en rien ma pratique […] Un produit sucré (qu’il soit plus ou moins sucré) reste un produit sucré qu’il faut apprendre à consommer. Il est donc nécessaire de modifier les comportements et les habitudes alimentaires tout en gardant le plaisir de manger. C’est ce que je préconise à mes patients[6]».

Aussi, la nécessaire réforme du bol alimentaire est en marche; à pas lents certes, mais en marche. Il semblerait que les instances régionales aient parié sur l’éducation du jeune public. En Guyane, par exemple, «des actions sont faites auprès des écoles pour sensibiliser les enfants». «En Guadeloupe, nous dit Hélène Vainqueur-Christophe, des programmes d’éducation à l’alimentation sont mis en place par la région dans le cadre scolaire mais aussi associatif» et à La Réunion «l’Agence de santé de l’Océan Indien a entrepris de mettre en place de nouvelles mesures pour favoriser une alimentation plus équilibrée en restauration scolaire où l’obésité infantile est préoccupante», nous indique Claudine Robert-Hoarau.

En attendant que s’installent de meilleures habitudes alimentaires, les industriels s’activent pour proposer des produits moins sucrés. Au passage, puisque la loi l’exige désormais, ils devront mettre fin à ce que Hélène Vainqueur-Christophe appelle une «arnaque alimentaire». Les dates de péremption des aliments qui pouvaient selon la député «atteindre jusqu’à trois cents jours de différence» devront désormais être alignées sur celles de la Métropole. Le mois prochain, la DGCCRF se verra confier la mission de sanctionner les éventuels contrevenants.

Harry Eliezer


[1] Auteur de Diététique gourmande, les bons réflexes pour une alimentation équilibrée aux éditions Dangles. Retourner à l’article

[2] ARS: Agence Régionale de la Santé – DAAF: Direction de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt de la Réunion. Retourner à l’article

[3] Rapport de la commission des affaires sociales de l’Assemblée Nationale du 28 septembre 2011. Retourner à l’article

[4] Maire de la commune de Trois-Rivières et rapporteur du projet de loi voté le 21 mai 2013. [5] Source: Institut de Veille Sanitaire – novembre 2010. [6] in Diététique gourmande, les bons réflexes pour une alimentation équilibrée.

A votre santé! – Slate.fr